Texte de Leslie Complan, 2008
Anne Brégeaut tentait d’apprivoiser de l’ennui :
celui qui s’installe dans toute relation au monde, et plus particulièrement
entre deux amoureux : ce sentiment de vide qui menace deux
protagonistes d’une histoire qui se veut sans fin, à l’image
de l’animation Happy End où deux clowns longent
une plage…Indéfiniment.
Mais cette gravité n’est pas légère, bien
plutôt pesante car l’image du couple, chez Anne Brégeaut,
reflète la solitude des êtres au sein des relations interpersonnelles. « Il
m’aime, un peu, beaucoup, à la folie, passionnément,
pas du tout. Il m’aime… », mais De
toute façon j’aime personne. Véritables réactions à la
vanité du temps et de l’espoir, les œuvres se construisent
inlassablement sur la dualité qui anime la recherche des limites
du sentiment, allant du désir à la frustration et au manque
comme dans sa vidéo intitulée Les mains. Elles
se frôlent, se rapprochent sans jamais réussir à ne
former qu’Un, corporel et temporel. Aujourd’hui Anne Brégeaut,
derrière le vide découvre le trop-plein du temps qui envahit.
Dans une tentative perpétuelle de compréhension du sentiment
comme entité, sa série de gouaches colorées expérimente
la fusion des contradictions: du positif et du négatif, ou encore
du sage et du fascinant. L’artiste dessine des fonds aux motifs
attirants et poétiques, tels que des fleurs ou encore des papillons,
auxquels elle confronte un sujet central, participant d’un onirisme
viscéral. La peinture Maman m’avait bien dit que notre
histoire serait un échec rassemble ainsi l’image d’une
opération chirurgicale sur fond de pâtisseries. Si les dernières œuvres
d’Anne Brégeaut témoignent de la violence et de l’ambivalence
sous-jacentes à tout sentiment d’attirance et de désir ,
c’est qu’elles posent avant tout le doute quant à la
réalité même des choses .
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